Vivre dans l’adversité – par Cynthia Audal

Vivre dans l’adversité – par Cynthia Audal

J’ai lu ma Bible complètement plus d’une fois dans ma vie. Pourtant, il y a des passages ou des personnages bibliques qui ne m’interpellent pas vraiment. Subitement, un événement arrive et vous êtes confrontés à la même réalité que cette personne. Dans mon cas, je parle spécifiquement de Job. Il est le modèle de souffrance, de perte, de tristesse profonde et de trahison. Parallèlement, il a fait preuve de fidélité envers Dieu, de foi et de persévérance. Il passe au travers de tribulations atroces, parce que Satan avait mis Dieu au défi.

L’Éternel dit à Satan : as- tu remarqué mon serviteur Job ? Il n’y a personne comme lui sur la terre ; c’est un homme intègre et droit, craignant Dieu, et se détournant du mal. Et Satan répondit à l’Éternel : est-ce d’une manière désintéressée que Job craint Dieu ? Ne l’as- tu pas protégé, lui, sa maison, et tout ce qui est à lui ? Tu as béni l’œuvre de ses mains, et ses troupeaux couvrent le pays. Mais étends ta main, touche à tout ce qui lui appartient, et je suis sûr qu’il te maudit en face. L’Éternel dit à Satan : voici, tout ce qui lui appartient, je te le livre ; seulement, ne porte pas la main sur lui. Et Satan se retira de devant la face de l’Éternel. - Job 1:7-12

J’ai lu à maintes reprises ce chapitre sans voir l’essence du message et comment il s’appliquait dans ma vie et mon quotidien. Maintenant, je lis cet extrait et je m’y retrouve…

En février 2016, on m’annonce que j’ai une maladie chronique qui affecte mon système immunitaire et attaque mes muscles. Pour cette raison, j’ai de la difficulté à utiliser les mes membres inférieurs et supérieurs de mon corps. Pour faire suite à l’aggravation de mon état de santé, j’ai une faiblesse généralisée qui nuit à ma mobilité physique. Je suis en cours de traitements médicaux agressifs et je crains quotidiennement d’avoir des complications reliées à la médication. Les médecins sont optimistes et j’ai la chance d’avoir des professionnels compétents qui s’occupent de moi. Mais encore…

Cette semaine, j’ai pris le temps de relire Job et de m’attacher à cet homme de foi. Et maintenant, je le comprends vraiment.

Comme nous tous, il se pose cette simple et unique question : pourquoi moi ?

Dans les premiers chapitres, on entend le discours de sa femme et ses amis. Moi, je restais accrochée au cri du cœur de Job. Il voulait trouver la place où il a mal agi pour y remédier et retrouver une vie normale.

J’agis et pense comme lui trop souvent.

En tant que chrétienne, on pense que connaître la vérité ou avoir une relation avec Dieu nous épargne des malheurs. Je vais être franche avec vous: c’est un mensonge et il faut enlever ce concept dans votre façon de penser.  J’ai lu cette référence dans les Psaumes et ce fut une révélation !

L’Éternel est près de ceux qui ont le cœur brisé, et il sauve ceux qui ont l’esprit dans l’abattement. Le malheur atteint souvent le juste, mais l’Éternel l’en délivre toujours. Il garde tous ses os, aucun d’eux n’est brisé. – Paumes 34 : 18-20

Malheureusement, le juste vivra des tribulations comme cet homme de Dieu et il n’y a pas d’exception. On n’aura probablement pas la raison de ces attaques dans nos vies, mais j’ai réalisé qu’avoir des réponses ne va pas changer la situation ou le cours de l’histoire. L’ennemi cherche à nous éloigner de Dieu pour être pris dans la douleur la souffrance, la colère et la tristesse profonde; il cherche à briser quelque chose de vital et d’important : l’intimité parfaite avec Dieu.

À la fin du livre, Dieu se révèle à Job. Il lui rappelle sa fidélité et qu’il est maître de tout. Dieu se présente comme étant un ami et sa justice. Il veut son bien autant que lui. Je suis touchée de voir la restauration dans la vie de Job et il retrouve tout ce qui lui a été volé par l’ennemi (Jean 10:10).

Aujourd’hui, dans cette période dans ma vie, j’ai compris ces points.

1. Vouloir connaître la raison de mon malheur n’aide à rien. On se questionne souvent pour savoir la raison de nos souffrances. À quel niveau a-t-on mal agi pour remédier aux problèmes ? Nous oublions que la douleur, la maladie et la souffrance sont une conséquence du pêché (Romains 6:23).

2. Questionner la nature de Dieu amène le doute et la peur. Nous avons de la difficulté à voir la bonté et l’amour parfait de notre Père céleste (1 Jean 4:8).

3. Rester prise dans les difficultés nous empêche d’avancer. Prisonnières de nos circonstances, nous sommes portées à vouloir tout arrêter. Nous regardons notre vie comme une finalité et la fin d’un meilleur avenir (Jérémie 29:11).

Malgré la maladresse de Job, je suis inspirée par :

1. Son désir d’un dialogue avec Dieu. Il ne faut pas avoir peur de Lui parler. Il cherche à avoir une relation avec Dieu. Il nous poursuit constamment (1 Jean 4:19).

2. Il n’a pas pris à la lettre les commentaires et les suggestions de son entourage. Vous serez étonnés ce que des gens et même des chrétiens vont dire lorsque vous vivez des tribulations. Il faut faire preuve de discernement en tout temps.

3. Il reste accroché à Dieu parce qu’Il est son seul appui.

Pour terminer, la vie de Job est une inspiration de persévérance et de ténacité.

Dieu nous montre son amour et sa fidélité. Il ne change pas et ne laisse pas le malheur arriver pour son bon plaisir. Au contraire, il a toujours eu un plan de rédemption pour l’humanité. Celui-ci est la mort de son fils unique à la Croix.

Photo by Andrew Neel on Unsplash

Achète les fleurs !

Achète les fleurs !

Vous voyez cette photo juste au dessus ? Elle marque une étape majeure dans ma vie. Pour vous, ce n’est certainement qu’une jambe qui se réchauffe auprès d’un feu de cheminée, mais pour moi, c’est la posture d’une femme qui aura mis vingt ans à oser vivre enfin.

L’été dernier, mon mari m’a surprise avec un week-end à deux pour célébrer notre anniversaire de mariage. Nous n’avions jamais osé le faire. La première raison ? Les enfants : jeunes, personne pour les garder en notre absence, etc, etc. La seconde raison ? L’argent : jamais assez, selon moi, pour se permettre ce genre de fantaisie. La troisième raison, celle qu’on avoue le moins ? Ce n’est pas utile, du moins, pas pour cette saison de ma vie. Il y a toujours plus urgent et il y a toujours plus important. Enfin, la raison “spirituelle” : la “bonne” chrétienne ne dépense pas dans ce genre de choses qui ne contribuent pas concrètement à l’avancement du Royaume de Dieu.

Je me suis donnée toutes ces “bonnes” raisons pendant longtemps pour ne pas oser faire des choses dont j’avais pourtant désespérément besoin. Et on ne sait pas à quel point on en a besoin jusqu’à ce qu’on les vive ! Nous les femmes, avons cette fâcheuse tendance à vivre en martyr, parce que nous croyons que c’est ainsi qu’on manifeste le mieux l’amour de Christ. Et c’est pour cette raison que des sujets comme le bien-être ou le soin de soi demeurent tabous dans la communauté chrétienne. On culpabilise ceux et celles qui les poursuivent en les traitant de chrétiens charnels. Et j’ai longtemps été de celles qui nient les besoins de leur âme, croyant que c’était une bonne marque d’amour sacrificiel envers les autres.

Et c’est pourquoi mon mari s’est retrouvé à devoir préparer en cachette cette première escapade en couple. Je mentirais si je disais que j’ai sauté de joie quand il m’a fait la surprise. Malgré le fait que j’aie apprécié son initiative, mille et uns questionnements me sont passés par la tête : Qui va garder les enfants? Comment feront-ils sans nous? Combien va coûter ce séjour? N’y avait-il pas ou n’y aura-t-il pas occasion plus importante pour dépenser nos économies? À quelle distance se trouve le lieu en cas d’urgence? Et si la maison prenait feu? Et si des cambrioleurs remarquaient notre absence et en profitaient? Et les tueurs d’enfants alors? À mesure que la date approchait, mon angoisse montait, mais la sérénité de mon mari a fini par me rassurer. Après trois mille dispositions et recommandations, nous sommes donc finalement partis à l’aventure, et c’est absolument ce qu’il me fallait pour opérer un changement drastique dans ma façon de penser et de vivre. Dieu le savait !

Mon Père a profondément touché mon coeur ce week-end là. À vrai dire, j’ai passé la majeure partie du temps à pleurer. Ce temps à l’écart, ces premières “vacances” en vingt ans, loin de tout et même loin des enfants, m’a vraiment déstabilisée, dans le bon sens. Dieu m’a montré à quel point j’étais prisonnière. Prisonnière d’un cycle de vie qui ne consistait qu’à réaliser tâches après tâches, du matin au soir, jusqu’à l’effondrement et pour reprendre dès le réveil. Je ne le faisais pas dans l’optique d’obtenir une médaille, une reconnaissance particulière ni même pour atteindre des objectifs précis. C’était juste ma vie, le train dans lequel je m’étais installée depuis vingt ans sans jamais me permettre de faire une halte, de descendre à une station. Un train qui allait et venait avec moi, assise dans un wagon, affairée au point de ne même plus prendre le temps ni de regarder le paysage ni même d’envisager d’en profiter. Oui, les enfants ont besoin de moi, mais j’ai réalisé que je ne leur offrais que des restes et pas la meilleure version de moi-même. J’ai réalisé que mes critères d’importance n’étaient pas toujours les bons. J’ai réalisé que je passais à côté d’une partie nécessaire à une bonne vie : le repos, l’arrêt. Et j’ai réalisé que depuis longtemps, je tournais à vide et qu’une partie de moi était sur la point de rendre l’âme.

Mais j’ai le Dieu du chemin, de la résurrection et de la vie. Et ce week-end en apparence superflu à mes yeux, s’est révélé comme un point tournant dans mon existence…

La journée même de notre retour à la maison, je me suis précipitée sur l’ordinateur pour réserver les premières vacances de toute notre vie de famille. Je l’ai fait vite, pour ne me laisser aucune chance de trop y réfléchir. J’ai pris le reste de nos économies et j’ai réservé une semaine au chalet, loin de tout, sans Wi-Fi, au coeur de la campagne. Et comme il fallait s’y attendre, j’ai commencé à le regretter à la seconde où j’ai refermé l’ordinateur, ma “raison” m’ayant rattrapée, notamment au sujet des finances. Mais par la grâce de Dieu, j’ai tenu ferme. Et à ce jour, ça reste l’une des plus belles décisions que j’ai prise de toutes ces années ! Une semaine, pas grand chose. Mais une semaine qui a fait la différence dans la vie de mes enfants et a créé en eux un indélébile souvenir. Une semaine de calme, de paix, de journées pluvieuses devant la cheminée, à faire des puzzles et des coloriages; de journées ensoleillées à jouer dehors, dans le Jacuzzi, au badminton ou au foot; de soirées barbecue ou feux de camp à griller des S’mores… Un an plus tard, les enfants en parlent encore, ma fille réclame cette expérience quasiment toutes les fins de semaine et quant à moi, je chéris le mémorable souvenir du moment où j’ai enfin décidé de vivre aujourd’hui, plutôt que de garder pour un demain qui ne m’est pas garanti.

Cette photo, c’est donc celle de jambes qui ont enfin cessé de courir pour se poser et profiter de la chaleur divine. Cette chaleur, Il me la manifeste par sa Provision quotidienne, mais je m’en suis longtemps privée en investissant prioritairement dans un avenir, sans même vraiment savoir lequel.

Aujourd’hui, j’ai appris.

  • J’ai appris que la vie se déroule au présent et que chaque jour qui passe est le futur qu’on s’évertue à construire tout en le manquant.
  • J’ai appris que je ne suis bonne à personne si je ne prends pas soin de moi et si j’ignore et tais constamment mes besoins, notamment celui de déconnecter et de partir en vacances.
  • J’ai appris que de porter un jugement de valeur sur mes besoins ne fait pas de moi une meilleure chrétienne, bien au contraire.
  • J’ai appris que les plus précieux souvenirs que garderont mes enfants de leur maman ne seront pas ceux de ses accomplissements académiques, professionnels ou ministériels. Ils ne se souviendront pas non plus de la maison que je me serais constamment évertuée à lustrer ou de la belle épargne que j’aurais laissé dormir à la banque pour la famille et pour un avenir lointain. Ils se souviendront des moments simples dans lesquels j’aurais généreusement investi pour vivre intentionnellement avec eux, des précieuses années qui ne reviendront jamais.

Cet été là, Dieu m’a enseignée sur l’importance du moment présent et d’investir occasionnellement dans des vacances, mais aussi régulièrement dans les petits plaisirs simples de la vie qui m’animent et m’égayent.

  • Ce beau bouquet de fleurs qui te fais envie mais devant lequel tu passes en te disant tristement que ce serait un achat superflu? Achète-le et laisse-le égayer ton foyer et te faire sourire le temps qu’il durera. N’attends pas que les fleurs viennent fleurir ta tombe ou d’en acheter pour fleurir celle de quelqu’un d’autre !
  • Ce bon gâteau au chocolat que tu te refuses constamment parce que tu surveilles ta ligne? Cuisine-le ou achète-le et savoure-en chaque bouchée !
  • Tu rêves de danser sous cette belle pluie chaude comme quand tu étais petite ? Sors et laisse-toi tremper. La voisine qui te regarde avec jugement par sa fenêtre aimerait secrètement retrouver cette liberté et cette insouciance que tu manifestes !
  • Ce café avec une amie qui te permettrait une belle pause dans ta routine ? Appelle-la et prenez-le !

Bref, vis au-jour-d’hui et poursuis la Gloire de Dieu dans ces plaisirs simples de ta vie présente ! Oui, l’avenir se prépare, il doit se construire avec sagesse et intention. Mais dans la quête d’un meilleur futur, n’oublie jamais le précieux présent d’un présent qui mérite d’être vécu comme si c’était tout ce dont tu disposais.

Et dans les faits, c’est bien tout ce dont tu disposes.

Les fleurs sont une de ces petites choses qui peuvent ensoleiller nos journées, mais qu’on ne juge pas toujours suffisamment utiles pour être intégrées à notre budget. C’est un tort.

Achète donc ces fleurs !

 

 

Hospitalité et culture

Hospitalité et culture

Il y a quelques temps, j’ai surpris mes garçons dans une discussion passionnée. Ils tentaient tour à tour de se souvenir des sensations que leur avait procuré un repas pris quelques jours auparavant en famille dans un restaurant de Montréal. À les entendre, on aurait juré qu’ils avaient les plats sous leurs yeux et les fumets du repas qui s’élevaient encore vers leurs narines ! Les souvenirs liés à la nourriture sont décidément les plus marquants, du moins dans ma famille ! Et pour moi, c’est l’un des éléments fondamentaux d’une belle hospitalité, non par la quantité et la variété des plats qu’on est capable de présenter à nos invités, mais plutôt par la capacité que la nourriture a de bien disposer les coeurs et de les inviter à s’ouvrir, quelque soit la culture.

J’ai vécu dans quatre pays et quatre cultures assez différentes et si j’ai bien appris une chose, c’est que la définition de l’hospitalité varie souvent. Seule reste stable, l’impact de la nourriture dans les rencontres et dans les connexions.

En Afrique par exemple, mon enfance a été marquée par les immenses tablées préparées par les femmes de la famille à Noël et à Pâques. Dès l’aube, mères, filles, tantes et cousines se retrouvaient dans les cuisines pour préparer l’énorme repas qui serait ensuite partagé pendant de longues heures autour de la grande table en bois fabriquée par mon père. J’étais souvent de corvée de dé-plumage de poulets ou de dépeçage de vipère ou de couleuvre rapportées de Boumyebel par mon père. Le destin de ces dernières ? Mijoter dans un bon Mbongo Tchobi accompagné de plantains mûrs, de macabos ou de Bakoa’a kogo. J’aimais particulièrement ce temps de l’année, le seul où mon père m’autorisait à boire un verre du délicieux vin de palme fraîchement récolté par mes oncles et cousins. Plus tard, après avoir décoré de guirlandes en papier mon petit sapin de fortune provenant d’une branche de pin généreusement offerte par les Parker, nos voisins anglais, je m’empressais de dresser la table et de disposer les nombreux plats : taboulé garni, oeufs mimosa, salades composée, Binsia (plantains frits), l’incontournable Mfiang Ndock de ma mère accompagné de son Ntumba (plantain pilé), bars et maquereaux à la braise accompagnés de bâtons de manioc et de sauce piment, Ndolè au boeuf et crevettes avec ses miondos, Sanga’a que je noyais dans le sucre, poulet braisé et/ou à la sauce tomate avec du riz sauté, Zo’om (sorte d’épinards sautés) avec ou sans arachides, mets de pistaches et, les bonnes années, un mets d’arachides pour mon plus grand plaisir ! Il me suffit de lister ces plats pour en sentir encore les odeurs, plus de vingt ans plus tard. Mais je me souviens surtout de l’ambiance générale qui rendait cette journée si spéciale dans mon coeur de jeune fille. L’hospitalité ici était marquée par ces temps de cuisine collective qui réconciliait la famille. On s’accueillait et on se pardonnait sans même avoir besoin d’échanger le moindre mot. Il n’était plus question d’aborder les différends qui avaient pu nous opposer durant l’année. Tout le monde s’accordait tacitement pour faire de cette journée, un mémorable temps de partage et de dégustation. Chacun contribuait à la hauteur de ses moyens et la journée se vivait et s’achevait dans la joie, les estomacs bien repus. Ces moments sont ceux qui me manquent le plus depuis que j’ai quitté ma terre natale…

De manière générale, quand il s’agit de recevoir, la coutume en Afrique est de cuisiner tout le repas avant l’arrivée des invités de sorte à rester disponible pour ceux-ci. Les invités plus audacieux (impolis?) n’hésitent pas à apporter un sac en plastique pour faire le plein de restes, des restes parfois généreusement offerts mais souvent discrètement dérobés. En Afrique, l’hospitalité rime avec satiété. Et c’est certainement de là que je tiens ma logique de toujours associer hospitalité et nourriture.

Direction l’Allemagne. Je n’y suis pas restée suffisamment longtemps pour en explorer toutes les coutumes hospitalières, mais une chose m’a choquée dès mon arrivée : Oui, les Allemands invitent, mais rarement chez eux et très souvent au restaurant. Mais surtout, méfiez-vous ! L’invitation pour les Allemands se limite à vous proposer chaleureusement d’aller ensemble au même endroit. Une fois sur place, sachez que vous devrez payer votre part ! Les serveurs vous poseront systématiquement cette question, même si vous avez clairement l’air en couple : “zusammen oder getrennt (ensemble ou séparément)” ? Si donc vous êtes une pauvre étudiante aux poches vidées par le loyer et les factures comme je l’étais, assurez-vous toujours de bien savoir qui paiera la note lorsqu’un Allemand vous invite. Pour eux, c’est tout naturel et culturel, mais pour vous cela peut causer un véritable choc. L’hospitalité pour l’Allemand consiste dans le temps qu’il offrira de partager avec vous, sa disponibilité pour vous à un moment bien précis. Vous passerez un bon moment, mais vous paierez votre part.

Direction la France et sa fameuse “Bonne franquette” ! En France, on invite, on partage. Dans les années 80 quand j’y ai grandi, l’approche était plus du type : ” Je cuisine et tu viens manger.” Généralement, les invités apportaient un bouquet de fleurs à l’hôtesse et/ou une bouteille de vin. De nos jours, même si cette approche demeure, la tendance est de plus en plus au repas collectif : chacun apporte un élément du repas (entrée, plat ou dessert ) et on partage le tout. L’essentiel c’est d’être ensemble et de perdre le moins de temps possible à faire la popote. L’hospitalité se manifestera donc surtout par la disponibilité et par notre capacité à interagir avec nos invités.

Direction le Canada où je vis depuis maintenant sept ans. Encore fortement empreinte de ma conception africaine de l’hospitalité, j’ai souvent été indélicate sans le vouloir avec mes invités, ou prise de surprise lorsque j’étais invitée chez les autres. Invités une fois chez des frères et soeurs en Christ, nous nous sommes retrouvés parents et enfants à cuisiner tout le repas ensemble avant de pouvoir passer à table. J’ai été fascinée par cette approche, mais ce fût surtout une grande leçon pour moi de voir cette soeur faire confiance à mes jeunes enfants dans sa cuisine plus que je ne l’avais jamais fait. Ils étaient heureux et si fiers de découper les légumes et même de les goûter ! Je n’en croyais pas mes yeux ! Ce fut un des plus beaux moments de nos débuts au Canada.

Une autre fois, un couple de l’église s’est spontanément proposé de venir dîner chez nous après le culte. Prise de court, les seules choses  auxquelles je pensais, c’était à mon frigo vide et à ma maison laissée en désordre. Ils ne nous ont pas vraiment laissé le choix et ils ont bien fait ! Un saut rapide à l’épicerie pour prendre une salade César, une baguette de pain, un poulet rôti, une tarte aux pommes et une bouteille de vin et tout était plié ! L’adepte de la planification que je suis était abasourdie par leur promptitude et leur spontanéité. Ils m’ont sorti de ma zone de confort pour la bonne cause. C’est aussi l’un des plus mémorables moments fraternels que j’ai vécu depuis notre arrivée.

Dans le cadre du ministère, nous organisons des tables où les femmes sont invitées à venir partager un repas déjà préparé pour elles. Pour autant, l’une d’elles est arrivée une fois avec un sac plein de nourriture, rien de surprenant quand on connaît sa grande générosité ! Et je ne compte plus le nombre de fois où les invitées m’ont demandé ce qu’elles pouvaient apporter. Au début, j’ai trouvé cette question irritante, pour finalement comprendre que c’était tout simplement culturel. Au Québec, les gens se sentent accueillis quand ils peuvent contribuer, et l’hospitalité passera donc par le fait de leur offrir la possibilité de contribuer concrètement à l’occasion qu’on leur offre. Depuis, j’ai appris à accepter les propositions de contributions qui me sont faites. Mieux, je réalise aussi qu’elles allègent la charge et cela m’encourage à inviter plus souvent, sachant que je n’aurai pas à tout cuisiner toute seule.

Mais mes vieilles habitudes ont la peau dure. Je demeure une grande adepte de la réception à l’africaine et mon plus grand bonheur, c’est de voir les gens se sentir chez moi comme chez eux. L’une des scènes les plus marquantes de mes sept années dans ce pays a été de voir un de mes invités réguliers se diriger spontanément vers mon réfrigérateur, tout en me parlant, pour aller chercher du beurre ! Ce n’est qu’une fois la main sur la porte qu’il a réalisé qu’il n’était pas chez lui et m’a demandé, embarrassé, si j’avais du beurre pour son morceau de pain. Il ne l’a jamais su, mais cette petite scène cocasse a fait sourire mon âme et c’est l’un des plus beaux témoignages qu’il m’ait rendu à ce jour : il se sent bien chez moi, il se sent chez moi comme chez lui.

J’ai donc appris qu’en matière d’hospitalité et de culture, il est important de saisir les nuances et de s’adapter tout en conservant précieusement ce qui fait notre particularité. Accueillir l’autre, c’est accepter que sa façon de faire soit différente de la nôtre et voir cette différence comme une richesse et non comme un obstacle. Accueillir l’autre, c’est aussi l’inviter à la découverte de notre culture sans pour autant la lui imposer bon gré, mal gré. En s’y prenant avec humilité, amour et patience et en acceptant certains compromis (comme de ne pas trop épicer votre repas traditionnel quand ceux à qui vous souhaitez le faire découvrir ne sont pas habitués aux épices !), on s’aperçoit vite que l’être humain a une saine curiosité qui rapproche même les cultures les plus opposées.

Pour ma part, je veux rester ouverte aux autres cultures tout en continuant de chérir ce qu’il me reste de la mienne. Quand je reçois, je veux pouvoir apprécier les dons de présence qui me sont faits tout en offrant la mienne dans sa version la plus authentique qui soit. Christ nous a commandé d’aimer les autres et d’exercer l’hospitalité. Si ma culture et mes traditions m’aident à atteindre cet objectif, tant mieux. Mais si elles m’en éloignent, alors en tant que chrétienne, je dois être capable d’en revoir humblement certains aspects. Au final, ce qui comptera vraiment, ce n’est pas l’extase de mes invités à la dégustation de mes plats exotiques. Ce qui comptera, ce sera l’accueil que j’aurais fait à leur culture, l’amour et le respect que je leur aurais manifestés malgré nos différences. Et de toutes les façons, en Jésus-Christ, il n’y a plus qu’une seule culture qui compte : celle de l’amour.

Photo de Streetwindy Photography provenant de Pexels

Comment savourer votre vie présente

Comment savourer votre vie présente

Avez-vous déjà eu l’impression que votre vie vous filait entre les doigts sans que vous ne sachiez réellement à quoi vous la consacrez? Les milles responsabilités qui hurlent notre nom du lever au coucher du soleil peuvent vite nous entraîner à vivre en mode automatique. Pire, lorsque les nouvelles sont mauvaises et que le monde se met à vivre comme en sursis, on risque nous aussi d’adopter, consciemment ou non, une approche de vie alarmiste dans laquelle nous vivons toutes sortes de scénarios hypothétiques tout en manquant la vie réelle qui se déroule devant nous.

J’ai longtemps été de celles qui se projettent dans un futur idéal tout en manquant un présent satisfaisant. J’ai longtemps été une rêveuse qui se plaisait davantage à rêver sa vie qu’à la vivre réellement. J’ai malheureusement manqué de précieux moments que je ne retrouverai jamais, tout simplement parce que je voyais constamment le verre à moitié vide et pas ce dont ma vie était déjà généreusement garnie. Jusqu’à ce que le Seigneur se mette à me reprendre. Et patiemment mais sûrement, Il a transformé ma perspective et a ouvert mes yeux sur l’importance de vivre le moment présent. Et dans le contexte de crise sanitaire actuel, lorsqu’on peut être tenté d’imaginer toutes sortes de scénarios effectivement envisageables, (ré)apprendre à savourer sa vie présente devient un excellent remède pour l’âme.

Alors, comment s’y prendre concrètement ?
Voici quelques étapes essentielles tirées de mon expérience personnelle.

1. Limitez les nouvelles

Si vous désirez retrouver la paix intérieure, peu importe ce qui se passe, il vous faudra limiter drastiquement, voire couper complètement votre consommation de nouvelles pour quelques temps. Savoir en temps réel comment évolue le Coronavirus ou le nombre de morts dans votre région ne vous aidera ni à tuer le virus, ni à mieux dormir la nuit. Vous savez ce que vous avez à faire pour contribuer à l’effort collectif pour limiter la propagation. Vous savez ce que vous avez à faire si vous manifestez des symptômes. Vous savez ce qu’il en est des dispositifs mis en place dans votre région. Vous savez quels magasins et services sont ouverts et lesquels sont désormais fermés. Vous savez donc l’essentiel. Faites votre part, mais préservez votre santé mentale et revenez à la réalité de la vie entre vos propres murs en limitant l’information.

2. Ralentissez le rythme

Il est bien plus facile d’être présente dans notre vie quand on cesse d’être pressée. Résistez à la tentation de remplir votre agenda. Réduisez votre liste de tâches à l’essentiel et abandonnez le reste. Vous saurez ainsi distinguer l’urgent de l’important, le nécessaire du superflu, et vous pourrez faire de la place et dire “Oui” aux choses qui apportent une réelle valeur ajoutée à votre vie, c-à-d celles qui animent vraiment votre âme. La vie se déroule dans une multitude de petits instants dont vous ne pourrez vraiment profiter que si vous ralentissez.

3. Créez des moments savoureux

Rangez vos téléphones et autres écrans et prenez 15 à 30 minutes par jour pour réfléchir et identifier les petites choses simples qui égayent votre quotidien, sans porter de jugement de valeur sur ces choses. Ces choses ne doivent pas forcément coller à des critères de haute spiritualité. Si elles font du bien à votre âme et vous aident à mieux voir les clins d’oeil de Dieu dans l’instant présent, elles sont spirituelles ! Une fois ces choses identifiées, faites-en des petits rituels que vous vivrez de manière intentionnelle.

Voici ma petite liste personnelle :

  • Savourer la première gorgée de café le matin.
  • Lire un chapitre d’un bon livre. En ce moment, je lis : “You Are What You Love: The Spiritual Power of Habit  de James K.A Smith”.
  • Savourer une part de gâteau avec votre thé préféré à une heure bien précise. Mes parfums préférés de thé sont : fruits estivaux, mélange de trois menthes et Rooibos vanille.
  • Prendre une longue douche chaude en dirigeant le jet sur des parties précises du corps pour se détendre : épaules, nuque, bas du dos par exemple.
  • Écrire dans mon journal intime : j’alterne entre un cahier simple et mon One line a day journal.
  • Écouter de la louange instrumentale. Ma chaîne préférée à ce sujet sur Youtube (que j’utilise également beaucoup pour mes temps de prière) est celle de DappyTKeys Piano worship.
  • Faire une petite marche dans le quartier.
  • Observer mes enfants dans leur sommeil avant d’aller me coucher.
  • Converser avec une bonne amie.
  • Allumer une bougie parfumée : mes parfums préférés, achetés au Wal-Mart ou Dollarama en fonction de mon budget sont spa relaxant, tarte pommes cannelle et cèdre ambré.
  • Se cuisiner un dessert particulier : pour moi, l’incontournable lava cake sans sucre ou un mug cake chocolat et beurre d’arachides.
  • Savourer un verre de vin dans le silence de la maison après le coucher des enfants. Ma plus belle trouvaille en rapport qualité/prix est le Valle della Rosa.
  • Regarder une série légère et sans prise de tête. J’évite toutes celles qui peuvent créer une lourdeur sur mon âme.

4. Soyez présente

On peut être présente de corps mais ne jamais l’être d’esprit, surtout nous les femmes qui sommes les reines du multi-tasking ! Si la capacité de faire plusieurs choses en même temps peut s’avérer utile dans bien des situations, elle nous empêche cependant de vraiment profiter de l’instant présent et de ce que l’expérience du moment nous apporte, quelle qu’elle soit. Revenons donc à une seule tâche à la fois et cultivons une présence mentale dans chacune d’elles, qu’il s’agisse d’un travail ou de moments plus légers passés seule ou avec nos proches : quelles émotions vous animent? Qu’observez-vous? Si vous ne deviez retenir ou ne vous souvenir que d’un seul élément dans l’instant en question, quel serait-il? Quelle heure est-il? Quel temps fait-il? À quoi ressemble le ciel? Avec qui êtes-vous? Comment êtes-vous habillée? Coiffée? Où êtes-vous? Cultiver l’habitude de remarquer tous ces détails dans les moments que vous vivez vous aidera à être vraiment présente et à ne rien manquer de l’expérience de votre propre vie.

5. Tenez un journal de gratitude

Pas grand chose à dire pour ce point. Si vous êtes chrétienne, vous savez que de rendre grâces est non seulement un commandement biblique, mais que c’est aussi le meilleur moyen de préserver un regard positif sur la vie. Tenir un journal de gratitude est une importante discipline spirituelle qui nous aide à marquer la Fidélité de Dieu, quelque soit ce qu’on a vécu dans une journée. Vous pouvez vous procurer mon journal de gratitude “Un jour à la Foi” pour une approche 100% chrétienne de la gratitude, et même en offrir une version illustrée et interactive à vos enfants dès 6 ans.

6. Commencez un projet Glory-chasing

Un autre moyen de savourer votre vie présente : le glory-chasing. Il s’agit de capturer et d’immortaliser la Gloire de Dieu reflétée dans la Création et dans les moments simples de votre quotidien, sans mise en scène et sans filtre Instagram ! Des moments qui vous forcent à vous arrêter, à marquer une pause pour observer ce qui se passe autour de vous : une bougie, une couronne de Pâques, une assiette vide, deux écureuils qui jouent dans un arbre, les couleurs pastels du ciel, un panneau de signalisation (oui, oui !), vos jambes, vos mains, des bananes, l’expression d’un visage…etc. L’important ici n’est ni la qualité, ni le style de la photo, mais ce que la scène vous a inspiré sur l’instant au sujet de Dieu, de sa Présence, de son Action ou dans votre relation avec Lui. Vous poursuivez sa Gloire pour sa Gloire, et non pour la vôtre en tant que super photographe aux meilleurs filtres !

7. Revoyez régulièrement vos priorités

J’ai commencé l’année 2020 par un quarante jours de jeûne et prière pour mes quarante ans et j’en ai aimé chaque minute, mais surtout les bonnes habitudes qu’il m’a aidé à cultiver dès le début de l’année. Oui mais voilà : une fois le jeûne et prière terminé et malgré toutes mes bonnes résolutions, je me suis rapidement laissée submerger et j’ai déplacé l’ordre de mes priorités. J’en ai été très frustrée. Depuis, je m’efforce de redevenir intentionnelle et cela demande une certaine discipline que nous, humains, n’avons pas naturellement. D’où l’importance de cultiver des habitudes sur le long terme et de ne point se relâcher. L’une des plus importantes choses que j’ai apprise pour m’aider à y parvenir, c’est de faire une réévaluation régulière de mes priorités. La vie va vite, tout change et tout peut basculer soudainement, comme nous le voyons avec la crise du Covid-19. Je me retrouve par exemple du jour au lendemain à devoir faire l’école à la maison à quatre enfants d’âge scolaire très différents et pour qui cette année était charnière à cause des nombreuses transitions à venir. Il a donc fallu tout revoir en termes de priorités. C’est ainsi et c’est ce qu’on appelle la vie. Mais si on n’a pas le réflexe de prendre une heure ou deux de manière régulière pour réévaluer ses priorités en fonction de notre réalité actuelle de vie, on se perd, on subit sa vie et on termine l’année sans l’avoir vu passer et sans avoir atteint le quart des objectifs qu’on s’était fixés. Comment s’y prendre? Idéalement, de manière saisonnière : fin d’hiver, fin de printemps, fin d’été et fin d’automne.

Posez-vous des questions simples :

  • Que gardez-vous de la saison ?
  • Que désirez-vous changer/améliorer ?
  • Comment allez-vous concrètement le changer/améliorer ?
  • Quelles sont vos trois plus importantes priorités pour la saison à venir ?

C’est une démarche que vous faites pour vous. Soyez donc le plus honnête possible avec vous-même. N’essayez pas d’embellir ou d’idéaliser ce que vous avez vécu et encore moins de faire l’autruche. Retenez les leçons apprises, armez-vous pour les changements à entreprendre et allez de l’avant, avec Dieu et une saison à la fois !

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Chaque jour qui passe est un jour de moins dans votre vie. Vous ne pourrez jamais revenir en arrière et il n’y a rien de pire dans une existence que de la terminer avec des regrets, surtout celui d’en avoir manqué l’essentiel. Ecclésiaste 2:24 nous dit que le seul bonheur qui soit réservé à l’homme consiste à manger, à boire et à prendre plaisir dans son travail, mais que cela aussi dépend de Dieu. À bien y regarder, il résume ici les réalités simples d’une vie quotidienne dans laquelle Dieu nous invite à être présentes, car même la minute suivante ne nous est pas garantie. Si donc nous avons la grâce de pouvoir ouvrir les yeux le matin pour vivre une nouvelle journée, faisons notre possible pour la vivre la plus intentionnellement possible et pour ne rien manquer de la Présence et de l’Action constantes d’Emmanuel, notre Dieu d’amour, toujours avec nous.

Photo principale de Tobi provenant de Pexels


Pourquoi et comment je fais le carême


Pourquoi et comment je fais le carême

Il y aura deux types de lecteurs pour cet article : ceux qui liront dès le titre avec la conviction d’avoir trouvé une de ces chrétiennes  « catholisée » qui n’a rien compris à l’Évangile de Jésus-Christ. Ils penseront trouver dans cet article de quoi me jeter la première pierre et prier pour “mon âme égarée”. Puis, il y aura ceux qui liront avec une saine curiosité et avec discernement, des chrétiens qui comme moi ont appris qu’un chrétien mature ne doit jamais jeter le bébé avec l’eau du bain. Quelque soit la catégorie à laquelle vous appartenez, bonne lecture !

J’ai décidé d’écrire cet article, car il s’inscrit dans la démarche intentionnelle dans laquelle je suis depuis quelques années, et dans le but d’inspirer celles qui veulent la poursuivre. Il est si facile dans nos quotidiens chargés de manquer la conscience de Dieu et nos bonnes intentions spirituelles en nous laissant submerger par les multiples « urgences » qui hurlent notre nom ! Je prends tout ce qui me permet d’être intentionnelle et de cultiver ce que j’appelle une “conscience de Dieu” dans les moindres petits instants de ma journée.

Comme beaucoup, j’ai grandi dans une culture catholique. Je parle bien de « culture » parce que ma famille ne fréquentait pas l’église. Nous étions ce qu’on appelle couramment des « croyants non pratiquants ». Dès l’âge de dix ans et pendant environ un an, je me suis rendue seule à la chapelle de notre quartier où j’ai développé un immense intérêt pour Dieu. Je n’ai pas eu le temps d’y apprendre grand chose des rituels et autres conventions. Tout ce que je sais, c’est que j’aimais la solennité des lieux et j’y ai développé une grande révérence envers Dieu. J’y ai appris l’importance de l’introspection et de la contemplation et ce sont deux disciplines spirituelles qui ont gardé une place majeure dans ma vie chrétienne tant elles me bénissent. Mon parcours catholique n’aura duré que très peu de temps. Je suis née de nouveau bien plus tard et après de nombreuses années de vie sans réelle relation avec Dieu et sans fréquenter d’église, toutes dénominations confondues. Mais après toutes ces années dans l’Église évangélique, malgré toutes les bonnes choses qu’on y trouve, l’un des plus grands travers à mon sens, c’est l’énorme emphase qui est constamment mise sur le « Faire » et pas assez sur “l’Être”. On reproche aux Catholiques de poursuivre un salut par les oeuvres. Pourtant, l’Église évangélique, bien qu’elle soutienne à juste titre le Salut par la grâce seule, met tellement l’accent sur le « fruit » que les chrétiens ne se définissent plus que par leurs accomplissements et les récompenses qu’ils en espèrent ici-bas ou au Ciel. Il y a une juste mesure qu’il faut trouver en toutes choses. Je l’ai appris, souvent durement. Et c’est pourquoi je ne jette plus précipitamment le bébé avec l’eau du bain. Dieu m’apprend à discerner. Je ne hurle plus au scandale ni ne voit trente six mille démons à la seule mention du mot “catholique”, mais j’apprends à retenir ce qui peut être bon.

L’une de ces bonnes choses, c’est le calendrier liturgique qui aide à cultiver une vie chrétienne intentionnelle. L’année n’est plus seulement un ensemble de jours et de saisons qui défilent inexorablement et que nous terminons souvent en nous demandant quand et où elle est passée. Les différents moments spirituels marqués par le calendrier liturgique aident à s’arrêter, à sortir du tourbillon de nos quotidiens, pour “savoir qu’il est Dieu”. Si vous êtes honnête avec vous-mêmes, vous savez que malgré toutes vos résolutions, vos bonnes intentions et votre belle planification, vous arrivez rarement à appliquer la discipline de mémoire, de gratitude, de jeûne et de prière que nous devons poursuivre en tant que Chrétiens. Et parce que nos réalités de vie nous rattrapent bien souvent malgré nous, des temps précis dans l’année qui nous invitent à nous arrêter sur un élément fondamental de notre foi chrétienne sont à mon sens des moments à considérer, peu importe qui en a lancé la tendance.

C’est pourquoi j’ai depuis peu décidé de marquer des saisons comme l’Avent et le carême pour vivre avec ma famille, des temps de célébration intentionnelle. Noël et Pâques ne nous tombent plus dessus comme sortis de nulle part, comme interrompant brusquement le cycle sans fin de la roue dans laquelle nous tournons au quotidien. Ils me permettent de méditer bien avant la date officielle, sur les importants événements qui marquent ma vie chrétienne et de me préparer à les vivre avec la bonne disposition de coeur. Noël, par exemple, ne devient plus une simple réunion familiale au cours de laquelle on doit se montrer la parfaite hôtesse, servir les plats les plus raffinés dans la maison la mieux décorée et avec des invités dont on ne supporte pas la face le reste de l’année ! Noël devient une saison d’attente, d’accueil et de célébration simple à l’image de la simplicité de notre Sauveur.

Et Pâques? Les quarante jours de carême intentionnellement observés m’aident à méditer sur le sacrifice de Christ et à me souvenir d’où Il m’a tirée. Ce n’est ni pour moi ni pour mes enfants la fête du chocolat et encore moins celle des lapins qui pondent des oeufs. C’est Jésus qui a obéi à Dieu, a cheminé vers une douloureuse destinée, par pur amour pour nous, a porté la Croix de mes péchés et est mort pour que je puisse vivre. Pâques qui coïncide souvent avec l’arrivée du printemps et de la nature qui renaît est également un doux rappel de la résurrection. Christ n’est pas resté sur la Croix, Il est ressuscité et j’ai moi aussi accès à cette résurrection par ma foi en Lui.

Suivre le carême ne consiste donc en aucun cas à se flageller pour tenter de réaliser à notre tour une oeuvre qu’Il a déjà accomplie. Se souvenir d’où on vient et ce que Christ a porté et souffert à notre bénéfice nous garde dans une nécessaire humilité que beaucoup trop de chrétiens « arrivés » ont malheureusement perdu de nos jours. Célébrer la résurrection en zappant la crucifixion est aussi dangereux que de vendre un Salut par les oeuvres ou une grâce « cheap » à l’aide d’un évangile bonbon!

Je cherchais donc quelque chose de simple pour marquer ces temps de l’année liturgique, lorsque j’ai découvert cette couronne fabriquée par les jeunes fils d’une auteure chrétienne que j’aime beaucoup : Ann Voskamp. Cette couronne trône désormais sur la table de ma salle à manger, vingt quatre jours pour l’Avent et quarante jours pour Pâques. Chaque jour, les enfants déplacent la bougie en comprenant vraiment le sens, non seulement du parcours, mais aussi celui du jour de célébration vers lequel on se dirige. C’est devenu un jeu. C’est à qui se réveillera en premier le matin pour déplacer la bougie ! Mais c’est surtout une approche toute simple qui permet un discipulat passif, surtout avec les jeunes enfants. Et pour moi l’adulte, à chaque fois que je passe devant – c-à-d de nombreuses fois dans ma journée de mère au foyer – je remarque la petite statuette de Christ portant la Croix (ou de Marie enceinte et assise sur un âne à Noël), et je pense au verset inscrit sur la statuette:

Mais lui, il était blessé à cause de nos transgressions, brisé à cause de nos fautes: la punition qui nous donne la paix est tombée sur lui, et *c’est par ses blessures que nous sommes guéris. Ésaïe 53:5

Alors pour moi le carême cette année et toutes les autres ? Il se fait sans cendres, sans rameaux et sans jeûne. Juste un quarante jours intentionnels durant lesquels je me rappelle et j’apprends à mes enfants à se rappeler à quel point nous avons été aimés. Nous nous rappelons aussi que cette vie ne tourne pas seulement autour de 365 jours et 4 saisons, mais autour de Dieu et de son activité dans et pour le monde : Avent, Noël, Epiphanie, Carême, Pâques et Pentecôte. Nous conclurons ce carême le 12 avril prochain, avec une Pâque simple et joyeuse dont le mot d’ordre sera : gratitude.

 La couronne à Noël

Pâques est la fête la plus importante pour les Chrétiens. La vivre de manière intentionnelle chaque année, chacun à sa façon, est à mon sens la moindre des choses que l’on puisse faire pour signifier l’importance qu’on accorde au plus grand acte d’amour qui ait jamais été manifesté aux Hommes. En cette saison sans précédents de crise sanitaire mondiale, il est plus que jamais nécessaire de garder le focus sur Celui qui a vaincu tous les virus à la Croix. Et si c’est l’église catholique qui a donné le go à une tradition, si elle est bonne et m’encourage à me rapprocher davantage de Dieu pour me souvenir de ce qu’Il a fait pour moi et de ce que je possède désormais en Lui, alors je jetterai l’eau du bain, mais je garderai certainement le bébé.

Photo principale par Priscilla Du Preez on Unsplash